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Santé

Saddle fitting: Les atteintes graves

Edité le 29/06/2016

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Saddle fitting: Les atteintes graves

Les blessures et les pathologies liées au harnachement


4/ Les atteintes graves

Bon, là on rentre dans le vif du sujet, dans le crade, ou dans le « comment une selle peut réellement  flinguer votre cheval ». Loin de moi l'idée de faire se pâmer les dames, mais c'est un fait : de même qu'une mauvaise posture à votre poste de travail peut vous exploser la colonne vertébrale (Hello Hernia), une selle inadaptée peut blesser gravement voire handicaper un cheval au point de le rendre immontable à jamais. Les atteintes que l'on risque au niveau profond sont de deux ordres : soit elles concernent directement la structure sous la selle, soit elles se répercutent sur la chaîne vertébrale en d'autres endroits (ah le mécanisme des compensations!) - mais ces dernières sont nombreuses, complexes et restent à démontrer plus précisément par le biais d'études toujours en cours, donc je n'en parlerai pas ici.

Les atteintes localisées sous la selle sont principalement les bursites, les desmites ligamentaires et les conflits de processus épineux. Malheureusement, celles-ci ne sont découvertes que lorsqu'il est trop tard... et sont soit longues à rentrer dans l'ordre dans les deux premiers cas, soit irréversibles et nécessitant des ajustements spécifiques dans le second. D'où l'intérêt d'un travail préventif.

 

Une bursite est une inflammation d'une poche séreuse (synoviale), située entre le haut des apophyses du garrot et le ligament supra-épineux dont elle facilite le coulissement. Communément appelée « mal de garrot », elle se caractérise par la formation d'une gonfle permanente sur la crête osseuse du garrot. Aussi appelée hygroma, elle correspond à un épanchement de synovie. Les tissus sont gonflés et douloureux à la palpation. Lorsqu'elle n'est pas prise à temps, elle peut évoluer en fistule puis en abcès. C'est grave, long et pénible à guérir : donc à la moindre suspicion, on appelle le véto !

La bursite au garrot peut être liée à une maladie, la brucellose, dont elle est l'un des symptômes ; mais aussi, of course, aux harnachements. Les sous-couvertures « protège-épaules » en lycra sont particulièrement mis en cause à cause de la compression permanente qu'ils exercent sur le garrot ; mais toutes les couvertures, tapis de selle ou amortisseurs mal coupés sont également à surveiller. Les harnais d'attelage peuvent être dramatiques de ce point de vue (si vous n'avez jamais vu le dos des chevaux ou des ânes du Tiers-Monde, voilà une chouette requête Google Image)... La selle est, elle aussi, tout à fait susceptible d'être la cause : si l'arcade de garrot est trop large ou que les matelassures avant sont trop fines, si le garrot est saillant, on s'expose clairement à ce risque. L'utilisation de tapis à fontaine ou fendus, de pads de garrot spécifiques ou de selles à arçon « nez coupé » peuvent limiter les risques ; mais très souvent, en évitant un problème à un endroit sans prendre en compte le schéma entier, on en crée un autre à un autre endroit. Une selle bien adaptée et positionnée, couplée à des tapis bien coupés, suffisent à limiter l'utilisation d'artifices.

Une fois que la bursite est apparue, il est possible qu'elle ne disparaisse pas complètement et qu'une trace d'hygroma demeure sur le garrot. Il faut la surveiller comme le lait sur le feu, et utiliser un matériel rigoureusement adapté une fois que le vétérinaire a donné son feu vert pour remonter l'animal.

 

Les desmites du ligament supra-épineux sont elles aussi assez fréquentes ; sur les réseaux sociaux tourne ces jours-ci l'histoire d'un cheval de complet qui malgré ses bons résultats ne prenait pas de dos ni d'arrière-main et grimaçait toujours au sanglage. Après examen vétérinaire : bim, desmite.

La desmite est au ligament ce que la tendinite est au tendon : une inflammation douloureuse et potentiellement chronique, causée par un traumatisme accidentel, un défaut postural ou une inadaptation du corps à son environnement (sol, matériel) ou aux contraintes exercées (travail).

Le tendon et le ligament sont des « cordages » qui rattachent des choses à d'autres : les tendons relient les muscles au squelette, alors que les ligaments tiennent ensemble les différents os d'une même articulation. La colonne vertébrale étant une longue suite d'articulations, il y a donc plein de ligaments dedans ; ceux qui nous intéressent particulièrement au niveau de la selle sont le ligament supra-épineux, qui comme son nom l'indique court sur la partie supérieure des apophyses vertébrales ; et les ligaments para-spinaux, qui sont positionnés de part et d'autre de la crête osseuse.

Ces trois ligaments sont susceptibles d'être impactés par la selle, si la gouttière est trop étroite, les matelassures trop dures ou anguleuses, si la selle empêche la montée du garrot et l'ouverture du processus épineux, s'il y a un problème d'équilibrage ou si la selle vrille et vient chevaucher le processus épineux. Là encore, une mauvaise coupe de tapis ou d'amortisseur peut être dommageable.

Une sensibilité répétée de la part de votre cheval dans la zone de la selle et au niveau des dits ligaments doit impérativement vous mettre la puce à l'oreille. Là encore, c'est un cas où l'appel au vétérinaire est obligatoire. Une desmite est une atteinte grave, et comme dans le cas d'une tendinite, sa guérison nécessite un long temps de repos, avec un traitement adapté (voire une intervention chirurgicale dans certains cas). Elle nécessite quoi qu'il en soit un diagnostic soutenu par l'imagerie médicale (radio / écho).

[HS : La raison probable pour laquelle le cheval mentionné au début de ce paragraphe tirait la gueule au sanglage, c'est parce que quand on sangle, les tissus corporels sont mis en tension sous la selle : c'est là que se révèlent les inconforts. Ca peut raconter plein de choses, de la simple inadaptation ergonomique de la selle à des problèmes plus profonds, comme cette desmite, ou alors des ulcères gastriques... On parle souvent de la selle comme catalyseur, ça n'est pas pour rien ! Donc quand tous les professionnels de l'équipement ont fait le tour de la question et que rien n'est à remettre en cause à ce niveau, il faut creuser plus profond.]

 

Troisième degré dans les atteintes sérieuses dont la selle peut être responsable : les conflits de processus épineux (CPE), ou « kissing spines ». Le nom est plus que parlant : les longues apophyses verticales qui s'érigent au-dessus des vertèbres dorsales entrent en contact les unes avec les autres et génèrent une chaîne conflictuelle qui peut aller du simple contact à la fusion osseuse, en passant par un phénomène d'érosion aussi grave que spectaculaire. La radio illustrant cet article montre un CPE multiple et à un grade plutôt élevé sur un pur-sang réformé de courses.

Ceux-ci sont assez répandus, malheureusement. Leurs causes sont mal connues : il semblerait que la génétique ait une part à jouer dans l'histoire, mais que la plupart du temps, c'est une maladie dont souffrent principalement les chevaux de selle, qui semblent statistiquement plus atteints que les chevaux d'attelage. L'explication en est assez simple : les apophyses des dorsales sont inclinées les unes vers les autres, orientation caudale (= vers l'arrière) pour les apophyses 1 à 12, anticlinale pour la 13 (= elle est verticale) et orientation rostrale (= vers l'avant) pour les apophyses 14 à 18. Le jeu du ligament supra-épineux, en lien avec le ligament nucchal, permet de fermer ou d'éloigner ces apophyses. Lorsque le cheval a la tête en haut et l'encolure raccourcie, les apophyses se rapprochent ; lorsque le cheval est en position d'extension d'encolure (ou qu'il broute) les apophyses s'écartent.

De là on comprend tout de suite que le poids sur le dos du jeune cheval, qui lui fait creuser le dos et relever haut l'encolure, est un facteur de risques très élevé. Il faut absolument que le cheval ait la force de porter son cavalier dans une attitude étendue où les ligaments ouvrent les apophyses. On comprend aussi les risques inhérents à la pratique d'une équitation « encolure haute » sur un cheval qui n'est pas prêt à porter... de même que d'oublier l'engagement de l'arrière-main. C'est par la mise en tension de toute sa ligne supérieure, de la tête à la queue, que le cheval peut adopter une attitude de portage du cavalier qui ne mette pas son dos en péril.

La selle joue un rôle dans tout ça, parce que par son inadaptation elle est susceptible de coincer le fonctionnement du dos, et donc de générer une posture réflexe mauvaise à long terme. En gros : si la selle pince le dos du cheval, le cheval a pour réflexe de creuser le dos. On rajoute du poids là-dessus : le dos creuse encore plus. Et même si on force l'extension d'encolure par l'emploi d'enrênements ou de mors coercitifs, si la selle stimule des points réflexes qui entraînent cette mauvaise posture, le dos sera toujours lâché. Si le dos passe en force, autre chose lâchera (la compensation, on vous dit! La compensation!)

DONC la selle doit être adaptée pour permettre le jeu complet des articulations, des ligaments et des muscles, en terme de longueur de surface d'appui, d'ouverture d'arçon, de libération du processus épineux et de l'équilibrage de la répartition des pressions engendrées par le poids du cavalier sur une surface d'appui calculée de façon optimale (à savoir : trop long c'est pas bon, trop court c'est pas bon non plus). Et en plus de ça, il faudrait que le cavalier sache bien monter   ;-)

Bon, une fois que le CPE est diagnostiqué et traité, le cheval n'est pas nécessairement arrêté dans son travail. Au contraire, certains vétérinaires préconisent même un travail assez soutenu de sorte à entretenir une musculature qui soutienne la structure osseuse abîmée, qui la « gaine ». C'est comme pour l'humain, l'entretien physique est d'autant plus important quand on a des problèmes de dos !

Et à ce moment-là, la selle ne doit pas être un obstacle au fonctionnement... il faut attacher d'autant plus de soin au choix de son matériel lorsque des situations comme celles-ci se présentent !


Allez, des petits chiffres pour la fin sur tous les problèmes qu'on peut rencontrer au niveau du dos de nos montures. D'après une étude vétérinaire menée en 2014 (cliquez ici), sur près de 3000 chevaux, plus de 20% présentaient des douleurs à la palpation thoraco-lombaire. Et sur 800 chevaux avec des troubles locomoteurs, on observe une réciprocité entre les troubles locomoteurs (boiteries) et les douleurs thoraco-lombaires : les boiteux ont à 32% mal au dos, les dorsalgiques boitent à 74% !!!

Donc si ça boîte et que ça a mal au dos, va falloir chercher l'oeuf et la poule...

 

Article rédigé par Eugénie Cottereau - http://www.saddlefitting.fr

Copyright illustration :  www.rockleyfarm.co.uk

Edité le 29/06/2016

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